Katanga Business Dans la jungle pleine de trésors du Katanga, en République Démocratique du Congo, une galerie de personnages sortis d’une grotesque fiction improvisée se partagent la vedette : un gouverneur de province aux allures d’apprenti Che baignant dans un flot de contradictions, quelques vieux renards de l’industrie minière, une armée de douaniers corrompus, des ouvriers en souffrance et partout, disséminée dans ce décor de western équatorial, une horde de Chinois réduits à l’état de silhouettes qu’on croirait sorties d’OSS 117. Si le nouveau film de Thierry Michel ressemble parfois à un mauvais épisode de Strip-Tease, c’est moins par sa tentation du gros coup (la comédie énorme qui se joue devant lui, à l’heure de la reconfiguration géopolitique de la RDC et des nouveaux marchés de la Chinafrique) que par excès de pudeur face à la complexité de l’état des lieux : le cinéaste semble constamment dépassé par l’irréelle et luxuriante mascarade où mène son enquête, se raccrochant à la farce comme à un masque pathétique et grimaçant – l’horizon silencieux de son entêtement. Vertigineuse, la pente du thriller flirtant avec l’apocalypse sur laquelle avance Katanga Business, dans une tradition du documentaire-aventurier qui fait parfois songer au Friedkin première période, dissimulerait presque la rigueur du travail d’infiltration et de synthèse, le refus de tout manichéisme autant que la pureté objective des portraits au long cours qui s’y déploient. Il y a là un sens si vif de la captation, une manière si subtile d’affirmer sa présence en toute neutralité (l’extraordinaire scène entre les deux directeurs après la réunion décisive pour l’avenir de la Gécamines) que tout, dans cet anti-Cauchemar de Darwin, s’ouvre à l’ampleur d’une effarante odyssée des temps modernes. Imparable. Les Cahiers du Cinéma - avril 2009 retour |